Qui s’y frotte s’y pique

Une attaque homophobe au collège m’a permis de ne plus en être victime grâce aux leçons de Maïté, ma professeur de judo.

Je me souviens que mes années à l’école primaire furent douces et sans aucun incident. Je passais mon temps avec mon meilleur ami Jean-Luc et mes copines et ne participais guère aux activités des garçons dans la cour de récréation. Et pourtant, je n’ai jamais souffert d’homophobie de la part des autres élèves. Nous faisions ce qui nous plaisait dans toute l’innocence de notre âge. Mais tout allait changer à l’arrivée au collège.

Je suis en 6ème, première année au collège. Nous sommes en milieu d’année et allons bientôt entrer en cours d’éducation physique que je déteste ainsi que le professeur, qui me le rend bien. Une classe d’élèves plus âgés nous laisse sa place.

Je remarque que des élèves se moquent de Jean-Luc et moi-même. Les insultes fusent : pd ! (Je sais déjà ce que cela signifie). Nous ne réagissons pas et essayons même de nous faire tout petits. Mais lorsque nous nous croisons, un élève à forte carrure bouscule Jean-Luc qui tombe. Ce dernier est assez petit, pas vraiment imposant. Je commence à protester et me précipite pour l’aider à se relever.

C’est à ce moment là qu’un autre élève, assez baraqué, arrive derrière moi et m’enserre avec ces deux bras. Je suis judoka depuis 6 ans et une des premières choses que tu apprends au judo, est de suivre le mouvement de ton adversaire, même s’il semble plus fort que toi, pour le déséquilibrer et l’envoyer à terre. (Je ne remercierai jamais assez mes parents de m’avoir inscrit au club de judo).

Malheureusement pour ce cuistre, mon réflexe de judoka est en alerte. J’envoie valdinguer mon assaillant sur le goudron qui se retrouve à terre, un peu sonné. Ce couillon est blessé avec pas mal d’égratignures. Personne ne réagit à part lui qui se met à pleurnicher et va se plaindre auprès de notre professeur.

Nous sommes convoqués dans le bureau où chacun donne sa version des choses. Même si le professeur ne m’apprécie vraiment pas, il semble surpris et impressionné. Il réprimande chacun d’entre nous. D’abord le patibulaire parce qu’il devrait avoir honte de s’attaquer à plus petit que lui. et puis moi-même car je me suis défendu avec une prise de judo qui aurait pu provoquer des blessures bien plus graves.

Il nous condamne à faire quelques tours du terrain d’athlétisme et nous demande de nous serrer la main car l’incident est clos. Nous le faisons de mauvaise grâce. Je m’attends à des représailles mais au fil des jours, il n’en est rien.

Bien sûr, la cause de la bagarre n’a été pas abordée car nous sommes en 1977.

Cet épisode assez anodin, une bagarre dans une cour de collège, a vraiment tout changé pour moi. A partir de cet incident, je n’eus à souffrir d’aucune moquerie ni attaque de la part de mes congénères pendant les quatre ans passés au collège ainsi que les quatre années passées au lycée.

Ce ne fut pas grâce à une réputation gagnée grâce à cette altercation, mais plutôt que j’acquis une assurance et une sensation d’invincibilité qui me donnaient une posture particulière. Cela dissuadait les éventuels agresseurs. Quant à Jean-Luc, il continua à souffrir d’insultes en passant devant des groupes d’élèves, mais au moment où je m’empressais de le rejoindre, cela les stoppait net.

Lorsque j’étais en terminale et que j’entendais la moindre réflexion de la part d’autres élèves, j’allais les affronter systématiquement. Je n’utilisais plus mes talents de judoka mais plutôt ma langue acérée et je terminais la conversation par “qui s’y frotte s’y pique”.

C’est pour cette raison que je passais pour une langue de vipère. 👹 Mais c’est une autre histoire.