Non, je ne vais pas me lancer dans l’écriture sur mon idolâtrie pour Kate Bush mais vous raconter comment elle a changé ma vie, carrément ! Ce texte est le quatrième d’une suite de chroniques, inspirées par la naissance de mon petit-neveu.
Ceux qui me connaissent, savent mon admiration de très longue date pour l’œuvre de Kate Bush..
Voici comment elle a changé mon rapport à la musique et, donc, ma vie.

1 – The Kick Inside, été 1978
En été 1978, je suis parti en camp, au Portugal, avec les Eclaireurs de France.
Nos parents avaient la possibilité de nous rendre visite pendant le séjour. Les miens vinrent avec ma grand-mère ainsi que ma sœur et nous passâmes deux jours à Porto.
Je n’ai plus trop de souvenirs de ce séjour. Cependant, je me souviens très bien que nous sommes passés dans une galerie marchande où il y avait un disquaire qui avait accroché toutes ses nouveautés sur les vitres de son magasin. Et c’est là que j’ai vu la pochette de The Kick Inside de Kate Bush.
Je connaissais son nom car j’avais entendu son single Wuthering Heigths et j’avais été fasciné par son clip vidéo. La voix et la personnalité de Kate Bush, sa manière d’interpréter cette chanson avec ses regards, sa danse, m’avaient complètement ensorcelé. Oui, je sais, le mot est un peu exagéré mais je peux vous dire que son impact fut énorme.
En voyant cette pochette dans la vitrine, il s’est passé quelque chose dans ma tête : Il fallait que je rentre dans le magasin et que je l’écoute. Je n’avais jamais mis les pieds chez un disquaire. Pourtant, ne parlant pas un seul mot de Portugais, je réussis à faire comprendre que je souhaitais écouter le disque. Je n’écoutais qu’un seul titre, Moving, avec le chant des baleines en début du morceau, les premiers accords du piano et la voix de Kate Bush qui commence à chanter. Ce fut un moment magique indescriptible, une claque phénoménale. En évoquant cet épisode, je suis en train d’écouter cette chanson et je ressens la même sensation.
Je devins obsédé à cette minute et je demandai à mes parents de m’acheter le disque. Je n’avais jamais fait cela et je trouve qu’ils furent vraiment très compréhensifs. D’abord pour avoir accepté de me laisser rentrer chez le disquaire et puis de me passer ce caprice soudain en acceptant de m’acheter le disque. Ont-ils compris que c’était vraiment important pour moi ?
Mes parents repartirent chez nous avec mon précieux disque et je rentrai, à reculons, au camp. Je n’étais plus du tout motivé et la fin du séjour fut longue, très longue. Je n’avais écouté qu’un seul titre mais je savais qu’un trésor m’attendait à Montauban.
Lorsque je revins chez nous, le tourne-disques fut réquisitionné dans ma chambre et je passai toute la fin de l’été à écouter, en boucle et “reboucle”, cet album. Est-ce le disque que j’ai écouté le plus dans ma vie ? Peut-être. Et soyez sûrs que les voisins profitèrent un maximum cette voix éthérée !
L’arrivée de Kate Bush dans ma vie a complètement changé mon oreille et mes goûts. En effet, je me suis éloigné pour quelques temps de la musique classique, même si elle a influencé ce que j’ai écouté par la suite. Cela a aussi aiguisé ma curiosité et m’a donné l’envie de découvrir d’autres artistes qui sortaient des sentiers battus.

2 – Lionheart, hiver 1978
A partir de ce moment là, je devins un habitué des disquaires. Ce fut d’abord au Scribe, une librairie de Montauban qui avait ouvert un département disque au premier étage. Endroit magique où le vendeur se trouvait à l’intérieur d’un comptoir tout rond et des platines avec casques avaient été installés tout autour. Il y avait un mur immense avec toutes les nouveautés de face. Les clients pouvaient venir au comptoir avec une pile de disques et s’installer autant de temps qu’ils le désiraient pour les écouter.
Le Scribe étant sur le chemin du retour du collège, je m’y arrêtais tous les jours. C’est ainsi que je m’initiai au plaisir de la découverte de nouvelles musiques. Je me fiais aux pochettes pour choisir ce que j’allais écouter. Ce fut une période assez solitaire mais passionnante.
A cette époque, je n’avais pas encore accès à la presse musicale et je ne n’étais pas au courant des sorties de disques. Une fin d’après-midi de novembre, j’allais passer mon moment musical au Scribe. Alors que je m’installai au comptoir, je vis sur le mur d’en face une pochette et je n’en crus pas mes yeux, un nouvel album de Kate Bush, Lionheart. Mais quelle pochette !
Je posai le disque sur la platine et Symphony in Blue commença à jouer… Encore une fois, le choc fut si grand que je confiais, immédiatement, le disque au vendeur, lui demandant de le mettre de côté car j’allais revenir l’acheter dans la demi-heure !
Je rentrai chez moi en courant afin de demander de l’argent à ma mère. Elle me le donna sans difficultés… J’avais beaucoup de chance de vivre dans une famille où nous ne manquions de rien et où demander un peu d’argent pour acheter un disque n’était pas un problème. Et j’étais encore plus chanceux d’avoir une mère aussi compréhensive. Je repartis aussi vite que j’étais venu car l’heure de fermeture était proche. Mais je courus à perdre haleine et j’arrivai à temps pour repartir, aussitôt, avec mon deuxième trésor de Kate Bush ! Une merveille !
3 – Never for Ever, automne 1980
Cette soif de découverte ne faiblit pas, au contraire, elle s’intensifia. Surtout que j’avais découvert un second disquaire où je passais tous les jours en revenant du lycée. Il s’agissait du département disques de la librairie principale de Montauban, la librairie Deloche, qui est devenue La Femme Renard.
J’étais devenu un accro à la recherche de nouveau sons. En trois ans, mon univers musical a connu une ouverture à 360°. Vous trouverez, à la fin de l’article, une playlist de tout ce que j’ai découvert pendant cette période.
J’adorais aller chez Deloche. D’une part, parce que le vendeur était adorable avec moi et d’autre part, parce que le magasin avait aménagé une salle d’écoute vraiment spéciale. Cette salle était complètement insonorisée avec une chaîne Hifi de très bonne qualité. L’écoute spatiale à haut volume changeait complètement la rencontre avec une oeuvre.
Le single Babooshka avait annoncé la sortie du nouvel album de Kate Bush. Celui qui était devenu mon disquaire préféré 🙂 m’avait averti du jour de sa sortie. Alors, comment vous dire ? Ce fut une journée interminable au lycée, je me revois ranger toutes mes affaires et me précipiter vers la rue Saint Louis.
Le carton n’avait pas encore été ouvert et j’eus donc le privilège de déballer Never for Ever et j’allai me réfugier dans la cabine d’écoute où je restai, le temps d’écouter l’album en entier.
Ce fut, bien sûr, un expérience inoubliable. Je souhaite à toute personne découvrant Kate Bush d’écouter pour la première fois des morceaux comme Delius, Blow Away ou All We Ever Look For, comme je l’ai fait.
Ah oui, les photos des trois pochettes, qui sont dans l’article, sont celles des disques originaux que j’ai toujours gardés auprès de moi, comme des porte-bonheurs.
4 – La soif de découverte
Toutes ces expériences m’ont donné une soif insatiable de découvertes musicales.
J’ai passé tellement de temps chez les disquaires de tous les endroits où je suis allé. Ce fut, tout d’abord en solitaire mais, ensuite, avec Jason qui partage la même passion.
Que ce soit à Paris, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Londres, New York, San Francisco, Berlin… j’ai de formidables souvenirs de perles rares dénichées au hasard de mes recherches.
J’ai trouvé l’album de Kate Bush, The Sensual World, chez un disquaire de Londres, trois semaines avant sa sortie. Pouvez-vous imaginer quel fut mon état lorsque je réalisai ce que j’avais dans les mains ?
Dans les villes où j’ai vécu, j’étais connu comme le loup blanc chez plusieurs disquaires où je passais tout mon temps libre.
Concernant les vinyles, pour certains albums, j’ai le souvenir précis de l’endroit où je les ai trouvés, les circonstances, ce que j’ai fait après les avoir achetés.
Je souviens, par exemple, de l’album Victorialand des Cocteau Twins. Ce jour-là, j’ai séché les cours de la fac, je me suis levé super tôt et je me suis préparé avec fébrilité. A l’heure d’ouverture des magasins, j’ai fait le tour de tous les disquaires de Bordeaux jusqu’à ce que je le trouve. Dès que je me le suis procuré, j’ai pris ma voiture et je suis parti chez mes amies Ninva et Stella, qui avaient une platine, pour l’écouter. J’ai fait la même chose avec Tinderbox de Siousxie and the Banshees et bien d’autres. Ninva et Stella furent bien patientes.
Le plaisir de l’acquisition, et ce qui allait autour, faisait partie de l’expérience.
Comme je l’ai déjà mentionné, ce sont les pochettes des disques qui m’ont permis de découvrir la plupart de la musique lorsque j’allais chez les disquaires. En effet, c’est comme cela que je me suis intéressé aux Cocteau Twins, Dead Can Dance, The Smiths, Pixies, la liste est longue. Même si je vais ne vais presque plus chez les disquaires, je me fie toujours à mon intuition lors de mes recherches sur internet.
Maintenant, je découvre la musique différemment mais je continue cette démarche de recherche active grâce à internet, aux blogs, la presse… Je n’utilise pas le streaming pour une découverte passive de la musique. Je n’y arrive pas.
Cette soif de découverte n’a jamais faibli et je consacre une grande partie de mes loisirs à cette passion. Certains soirs, je ne vois pas le temps passer lorsque un artiste me mène vers un autre artiste, une œuvre complète, la perle rare, le bonheur.
5 – Une playlist spéciale Premières Découvertes
Pendant que j’écrivais cette chronique, je me suis remémoré tous les artistes et les disques que j’ai découverts lorsque j’ai commencé à fréquenter les disquaires. Cette période correspond à mes années de lycée de 1978 à 1981. J’ai eu envie de constituer une playlist avec quelques artistes qui m’ont le plus marqué.